Prévenir le Coronavirus : Gérer les risques en milieu de travail

3 février 2020 | Lisen Bassett, Greg Bush, Alissa Raphael, Kathryn M. Frelick

La récente épidémie du nouveau coronavirus (2019-nCoV) (« Coronavirus ») continue de susciter des inquiétudes partout dans le monde, ce qui va surement augmenter, étant donné que l’Organisation mondiale de la santé (« OMS ») a classé l’épidémie comme étant une « urgence de santé publique internationale » le 30 janvier 2020. Cette caractérisation signifie que le virus est un risque pour la santé publique dans des endroits au-delà de son pays d’origine, et peut nécessiter une réponse internationale coordonnée pour le contrôler.

Bien que les effets les plus graves soient encore largement contenus en Chine, son pays d’origine, plus de 18 pays dans le monde ont signalé des cas de coronavirus, dont quatre (4) cas confirmés à ce jour au Canada.[1] En raison des leçons tirées et des mécanismes juridiques élaborés en relation avec la pandémie de SRAS de 2003, il y a une meilleure coordination et planification des efforts à tous les niveaux de gouvernement. À l’heure actuelle, l’épidémie est gérée par les organismes provinciaux et territoriaux de gestion des urgences et de santé publique.

Il y a des inquiétudes sur le fait que le Coronavirus puisse se propager par diverses formes de contact entre humains, ce qui soulève des problèmes sur le lieu de travail et ramène de sombres souvenirs de la pandémie de SRAS de 2003. Les leçons tirées de la pandémie de SRAS devraient conscientiser les employeurs et améliorer leur réaction au Coronavirus. Le présent communiqué vise à fournir aux employeurs canadiens des informations et des conseils pour faire face aux problèmes qui peuvent se poser sur le lieu de travail. Nous encourageons les employeurs à surveiller la situation au fur et à mesure qu’elle évolue.  Nous avons inclus ci-dessous quelques liens utiles vers des sources d’information.

Normes d’emploi

Les principales préoccupations concernant l’application des normes d’emploi sont celles relatives aux absences des employés pour cause de maladie, d’obligations familiales et autres congés connexes. Les employés peuvent avoir droit à des congés statutaires avec ou sans solde en lien avec les effets du Coronavirus sur eux-mêmes ou les membres de leurs familles.

En Colombie-Britannique, il n’existe pas de droit statutaire à un congé de maladie payé, de sorte que le droit d’un employé à un congé de maladie payé est déterminé par son contrat de travail. Toutefois, le Employment Standards Act (« ESA ») de la Colombie-Britannique permet à un employé de prendre jusqu’à cinq (5) jours de congé sans solde pour des obligations familiales reliées au soins d’un membre de leur famille atteint de maladie. L’ESA de la Colombie-Britannique accorde également aux employés jusqu’à 27 semaines de congé sans solde à titre de soins de compassion afin de fournir des soins ou un soutien à un membre de la famille qui souffre d’une maladie grave avec un risque important de décès dans les 26 semaines, ainsi que jusqu’à 36 semaines de congé non payé pour fournir des soins ou un soutien à un membre de la famille dont l’état de santé de base a considérablement changé et dont la vie est menacée par la maladie.

En Alberta, un congé pour maladie grave est offert aux salariés employés depuis au moins 90 jours chez le même employeur. Les employés peuvent prendre jusqu’à 16 semaines pour la maladie grave d’un adulte ou 36 semaines pour la maladie grave d’un enfant en congé sans solde. Un certificat médical est requis pour justifier la maladie grave et pour démontrer que l’employé doit prendre soin du membre de la famille.

En Saskatchewan, le Saskatchewan Employment Act prévoit que les employés ayant au moins 13 semaines d’emploi chez un employeur ne peuvent être victimes de discrimination en raison d’une absence pour cause de maladie ou de blessure. Les employés admissibles peuvent prendre jusqu’à 12 jours sans solde par année civile en raison d’une maladie ou d’une blessure non grave, et jusqu’à 12 semaines sans solde lorsque la maladie ou la blessure est considérée comme grave. Les employés ont également droit à une protection d’emploi similaire lorsqu’ils sont absents du travail en raison de la maladie ou des blessures d’un membre de la famille immédiate pourvu que celle-ci soit une personne à charge. Si la maladie ou la blessure constitue une invalidité, des obligations supplémentaires sont imposées à l’employeur conformément au Saskatchewan Human Rights Code, 2018.

En Ontario, la Loi de 2000 sur les normes d’emploi prévoit que les employés comptant au moins deux (2) semaines de service auprès d’un employeur peuvent prendre jusqu’à trois (3) jours de congé sans solde en raison d’une maladie personnelle, d’une blessure ou d’une urgence médicale, ainsi qu’un congé supplémentaire sans solde de trois (3) jours pour s’occuper d’un membre de la famille qui est tombé malade. Les employés peuvent également avoir droit à un maximum de huit (8) semaines de congé sans solde pour fournir des soins ou du soutien à un membre de la famille souffrant d’une maladie grave, jusqu’à 28 semaines de congé sans solde pour s’occuper d’un membre de la famille souffrant d’une maladie grave avec un risque important de décès dans les 26 semaines, jusqu’à 37 semaines pour s’occuper d’un enfant mineur gravement malade et jusqu’à 17 semaines pour s’occuper d’un adulte gravement malade. De plus, les employés peuvent avoir droit à un congé sans solde en vertu des dispositions de la Loi de 2000 sur les normes d’emploi s’ils ne sont pas en mesure d’exercer leurs fonctions en raison d’une urgence déclarée et parce que, par exemple, ils sont sous instructions de rester dans un endroit déterminé ou doivent être placé en quarantaine.

Au Québec, la Loi sur les normes du travail accorde jusqu’à 26 semaines de congé sans solde par période de 12 mois pour cause de maladie ou d’accident, les deux (2) premiers jours étant payés pour les employés ayant trois (3) mois de service continu. Les employés peuvent également avoir droit à un maximum de 16 semaines de congé sans solde par période de 12 mois pour s’occuper des membres de leur famille.

Il est important de noter que la législation de chaque province peut définir de manière différente qui est considéré comme un « membre de la famille » et peut exiger que certaines formalités soient remplies (par exemple, un avis écrit, des documents médicaux, etc.) avant qu’un employé puisse exercer ses droits en matière de congé de maladie.

De plus, les exigences légales peuvent être susceptibles d’être modifiées, comme elles l’ont été lors de l’épidémie de SRAS. Par exemple, la Loi de 2003 sur la stratégie d’aide et de reprise suite au SRAS a accordé aux employés des congés supplémentaires sans solde pour des examens médicaux, des traitements ou une mise en quarantaine pour eux-mêmes ou les membres de leur famille.

La santé et la sécurité au travail

Partout au Canada, les employeurs doivent s’assurer que leurs milieux de travail sont sécuritaires pour les employés.

Chaque province a une législation qui définit les obligations des employeurs en matière de santé et de sécurité au travail. Cependant, quelles que soient les provinces où vous avez des milieux de travail, les précautions suivantes en matière de santé et de sécurité au travail sont recommandées:

  • Continuez à rappeler aux employés de se laver les mains.[2]
  • Si un employé présente des symptômes de Coronavirus[3] ou a été en contact direct avec une personne qui présente des symptômes de Coronavirus, considérer s’il faut lui refuser l’accès au travail, de renvoyer l’employé chez lui pour l’isolement et de lui conseiller de consulter un médecin.
  • Si un employé s’est rendu à Wuhan, Chine pendant ou juste avant l’épidémie, considérer s’il faut lui refuser l’accès au travail, de renvoyer l’employé chez lui pour l’isolement et de lui conseiller de consulter un médecin.
  • Envisager de restreindre les voyages non essentiels dans les pays touchés par l’épidémie.

Pour plus d’informations, veuillez consulter les directives provinciales applicables à vos milieux de travail:

N’oubliez pas que la plupart des employés, à l’exception des intervenants d’urgence, de certains employés de la fonction publique et des fournisseurs de soins de santé de première ligne (selon la province), peuvent refuser de travailler s’ils croient que leur lieu de travail présente un danger pour leur santé ou leur sécurité.

Si un tel refus est prononcé, les employeurs doivent immédiatement enquêter sur la situation et tenter de résoudre la situation avec l’employé. Dans le cas où une résolution est impossible, les employeurs doivent en informer l’inspecteur du travail ou l’agent compétent, conformément à la législation provinciale.

De plus, les employeurs ne peuvent pas menacer, discipliner ou autrement exercer des représailles contre un employé qui refuse de travailler en raison de problèmes de santé et de sécurité au travail.

En fait, il est important que les employés ne se sentent pas pénalisés pour avoir refusé de venir travailler en raison de problèmes de santé liés au Coronavirus. Un isolement adéquat et des soins médicaux rapides peuvent être essentiels pour empêcher la propagation du virus. Les employés qui viennent travailler, malgré des symptômes dus aux craintes de ne pas pouvoir se permettre un congé sans solde, augmentent le risque d’infection sur le lieu de travail.

De plus, les employeurs voudront peut-être envisager de s’assurer que le Coronavirus est conforme à toutes les politiques d’invalidité de courte durée en vigueur. Étant donné que chaque régime d’assurance est unique, nous vous suggérons de contacter directement votre assureur pour déterminer si les employés qui doivent être isolés ou placés en quarantaine sont admissibles aux avantages de votre régime. Les employeurs peuvent également envisager d’autoriser les employés à prendre un congé de maladie, des jours de vacances ou des jours de congé, ce qui leur permet de s’absenter du travail sans pénalité.

Sécurité et assurance au travail

Si les employés sont infectés par le Coronavirus et peuvent lier la contraction du virus à la nature de leur emploi, ils pourraient avoir droit à des indemnités en vertu des programmes de prestations de santé et de sécurité au travail.

Pendant la pandémie du SRAS, la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail de l’Ontario (la « Commission ») a annoncé que les travailleurs présentant des symptômes du SRAS qui avaient été infectés au cours de leur emploi pourraient avoir droit aux prestations de la Commission, à déterminer au cas par cas.

Aucune annonce de ce genre n’a encore été faite par aucun des conseils provinciaux ou fédéraux du Canada.

Droits et libertés de la personne : discrimination et handicap

Partout au Canada, les employeurs doivent prendre des mesures positives pour s’assurer que leurs employés travaillent dans un environnement exempt de harcèlement et de discrimination. La législation provinciale sur les droits et libertés de la personne interdit la discrimination et le harcèlement dans le contexte de l’emploi dans le secteur privé. Parmi les motifs de discrimination protégés par les provinces figurent l’ascendance, le handicap, la race, l’origine ethnique et le lieu d’origine (selon la province).

Bien qu’aucune jurisprudence ni politique officielle n’ait été publiée au niveau fédéral ou provincial sur la classification du Coronavirus comme handicap, la réponse de la Commission ontarienne des droits de la personne (« CODP ») pendant l’épidémie de SRAS indique que les développements dans ce domaine doivent être surveillés.

La CODP a classé le SRAS comme un handicap et, par conséquent, les employeurs de l’Ontario étaient tenus d’accommoder les employés atteints du SRAS ou les employés exposés au SRAS. L’étendue de l’accommodement requis variait selon les circonstances, mais pourrait inclure le fait de permettre à l’employé concerné de s’absenter du travail ou de faire du télétravail, lorsque possible.

De plus, les origines du Coronavirus seraient à Wuhan, Chine, et le virus est connu pour se propager à travers la Chine continentale à Hong Kong, au Japon, en Thaïlande et au Vietnam. Semblable à l’épidémie de SRAS, on craint une éventuelle discrimination ou harcèlement contre la communauté canado-asiatique du Canada. Les employeurs doivent savoir que le fait d’empêcher l’accès au lieu de travail ou de refuser d’embaucher une personne en raison d’un motif protégé par la législation applicable sur les droits de l’homme pourrait être considéré comme discriminatoire.

L’assurance-emploi

Pendant l’épidémie de SRAS, Développement des ressources humaines Canada a modifié le Règlement sur l’assurance-emploi pour répondre aux demandes de prestations liées au SRAS. Lorsqu’une période de quarantaine avait été imposée ou recommandée par un responsable de la santé publique ou que la personne avait été invitée par son employeur, son médecin ou une autre personne en autorité à se placer en quarantaine, la période d’attente habituelle de deux semaines a été levée ainsi que certaines exigences documentaires.

Il est encore trop tôt pour déterminer si le gouvernement fédéral adoptera la même approche, d’autant plus que l’Agence de la santé publique du Canada maintient que le risque pour la santé publique du coronavirus pour les Canadiens est faible.[4]

Problèmes de confidentialité

Les employés ont toujours le droit de s’attendre à ce que la confidentialité de leurs informations personnelles, y compris leurs données médicales, soit protégée. Les employeurs doivent trouver un équilibre entre la nécessité de veiller à ce que les renseignements personnels privés ne soient pas divulgués à l’ensemble du personnel et leurs obligations d’assurer la sécurité du lieu de travail.

Nous encourageons les employeurs à contacter les groupes Travail et emploi, Industrie de la santé et Confidentialité de Miller Thomson pour toute question concernant les informations sur la santé des employés que vous êtes en droit de demander, comment elles peuvent être utilisées et à qui elles peuvent être divulguées et dans quelles circonstances.

Recommandations pratiques et gestion des risques

À notre avis, tous les employeurs devraient prendre des mesures proactives pour assurer la protection de leur lieu de travail. Les actions suivantes peuvent faire l’objet d’une politique ou d’une directive de l’employeur et doivent être clairement communiquées sur l’ensemble du lieu de travail:

  • L’employeur doit fournir des informations sur le Coronavirus aux employés et décrire les symptômes et les critères à surveiller, ainsi que les mesures que l’employé et l’employeur doivent prendre.
  • L’employeur doit désigner une personne ou former une équipe pour surveiller le Coronavirus sur le lieu de travail et coordonner les efforts de prévention.
  • Les employés devraient être encouragés à se placer en quarantaine volontairement s’ils présentent des symptômes ou ont été en contact direct avec une personne symptomatique du Coronavirus. Les employés doivent être informés des exigences de notification lorsqu’ils prennent la décision de se placer en quarantaine volontairement.
  • Les employeurs devraient tenir compte de leur politique dans le cas où un employé présente des symptômes ou a été en contact avec une personne qui est symptomatique du Coronavirus et que cette personne ne s’est pas placée en quarantaine volontairement.
  • Les employés devraient être encouragés à se laver les mains fréquemment. Des panneaux devraient être affichés dans les zones appropriées à cet égard. Les employeurs peuvent également envisager d’offrir des fournitures d’hygiène des mains.
  • Selon les progrès du virus au Canada, les employeurs devraient envisager de réviser leur politique sur les voyages et les rapports sur les voyages dans les régions à risque élevées.
  • Les employeurs peuvent initier des directives limitant les contacts interpersonnels internes et externes non essentiels. L’utilisation de la technologie à la place du contact de personne à personne peut être encouragée.
  • Des plans d’urgence devraient être élaborés pour limiter les interruptions de travail possibles pour ceux qui accomplissent des tâches essentielles sur le lieu de travail.

Ce qui précède peut être soumis à des obligations contenues dans des conventions collectives ou des contrats de travail individuels.

Les employeurs doivent veiller à surveiller régulièrement les mises à jour de l’OMS et des sites gouvernementaux.

Le Groupe national du travail et de l’emploi de Miller Thomson et le Groupe national de l’industrie de la santé travaillent ensemble pour surveiller les développements juridiques et politiques du Canada en réponse à la menace du coronavirus et fourniront des mises à jour au fur et à mesure que la situation évolue.

Ce communiqué est une synthèse des informations actuellement disponibles. Pour des informations plus détaillées, veuillez consulter les sites Web répertoriés dans ce communiqué et ci-dessous.

Liens utiles

Organisation mondiale de la santé : https://www.who.int/fr/emergencies/diseases/novel-coronavirus-2019

Agence de la santé publique du Canada : https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/maladies/2019-nouveau-coronavirus.html

Mises à jour du Québec sur le coronavirus : https://www.quebec.ca/sante/problemes-de-sante/a-z/coronavirus-2019/

Ministère de la Santé de l’Ontario : https://www.ontario.ca/fr/page/nouveau-coronavirus-2019-ncov

Santé publique Ontario : https://www.ontario.ca/fr/page/nouveau-coronavirus-2019-ncov

Lien du gouvernement de l’Alberta vers des informations sur 2019-nCov pour les Albertains: https://www.alberta.ca/coronavirus-info-for-albertans.aspx (en anglais seulement)

Page du service de santé de l’Alberta sur le virus : https://www.albertahealthservices.ca/topics/Page16944.aspx (en anglais seulement)

Renseignements sur la santé publique en Saskatchewan : https://www.saskatchewan.ca/government/health-care-administration-and-provider-resources/treatment-procedures-and-guidelines/emerging-public-health-issues/2019-novel-coronavirus (en anglais seulement)

Maillon santé Colombie-Britannique : https://www.healthlinkbc.ca/ (en anglais seulement)

Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique (coronavirus) : http://www.bccdc.ca/about/news-stories/stories/2020/information-on-novel-coronavirus (en anglais seulement)

 

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[1] Ceci est exact au moment de la rédaction de ce communiqué.

[2] Pour des imprimés téléchargeables en français et d’autres informations sur les précautions de santé et de sécurité, consultez la page des conseils publics de l’OMS: https://www.who.int/fr/emergencies/diseases/novel-coronavirus-2019/advice-for-public

[3] Pour obtenir des renseignements sur les symptômes du coronavirus, veuillez consulter le site Web du gouvernement du Canada : https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/maladies/coronavirus.html

[4] Pour les mises à jour, veuillez visiter le site Web de Services de santé publique Canada : https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/maladies/2019-nouveau-coronavirus.html

 

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